Transit de Vénus au Lycée d'Uturoa le 5 juin 2012 avec un télescope Solarmax II 60mm + 1 webcam ToUcam
(noter les petites protubérances à droite)
Selon un cycle de 8 ans, puis 105 ans, puis 8 ans, 122 ans, 8 ans, etc.. Vénus passe plus ou moins discrètement devant le Soleil. On appelle cela un transit.
Un transit de Vénus donc.
Ce fût le cas ce mardi 5 juin 2012 entre midi et 17h en Polynésie Française.
Trop éloignée pour faire une éclipse, mais suffisamment grande pour que les astronomes puissent relever sa position d'heure en heure, Vénus, avec ses fameux transits, a permis par le passé de calculer la distance Terre-Soleil, pierre angulaire de tout le système solaire.
En effet, la troisième loi de Johannes Kepler, énoncée en 1618: T² / R^
3 pour chaque astre tournant autour du Soleil, permettait alors, grâce au calcul précédent, d'obtenir immédiatement les toutes premières bonnes estimations des dimensions de tout le système solaire ! (jusqu'à Saturne à l'époque).
On comprend donc pourquoi tant de missions scientifiques ont été organisées par tous les pays d'Europe à chaque transit entre 1761 et 1882.
En Polynésie, on retient surtout celle de 1769 durant laquelle James Cook fit construire à Mahina et tout spécialement pour l'occasion, un petit fort muni d'un socle en dur: son "observatoire".
Où donc à Mahina ? Et bien à la Pointe Vénus pardi !
C'est en effet l'origine du nom de cette fameuse et belle plage de sable noir.
Parmi tous les explorateurs & scientifiques ayant dû à l'époque parcourir les océans pour observer et mesurer les transits de Vénus, certains ont péri durant le voyage aller, d'autres celui du retour, et un en particulier est resté célèbre pour sa singulière malchance :
Guillaume Le Gentil.
Parti de France en mars 1760 pour Pondichéry afin d'y observer le transit de Vénus, il ne put y établir son observatoire car Français & Anglais s'y faisaient la guerre, là-bas aussi.
C'est donc en pleine mer, sous les roulis, tangages et autres lacets de son fier vaisseau qu'il observa péniblement le petit globe vénusien passer devant le disque solaire en 1761: aucune mesure possible donc.
Il décida de rester 8 ans sur place. Et eut donc tout le temps pour préparer le transit de 1769 (le même que celui de Cook à Tahiti).
Son observatoire était prêt, il avait affiné sa technique, et il faisait un temps splendide.
Sauf le jour J où un monstrueux nuage noir vint se placer durablement entre son télescope et le couple Soleil-Vénus durant toute la phase du transit.
Juste après, le beau temps revint. Triomphant.
Passablement déprimé, Le Gentil eut ensuite toutes les peines du monde pour revenir en France (épidémie, quarantaine, cyclones, naufrages, etc...).
Lorsque fin 1771, soit presque 12 ans après son départ, il repose enfin un orteil sur son sol natal, c'est pour apprendre qu'aucune des lettres qu'il avait écrites n'était arrivée, et qu'il avait donc été déclaré légalement mort.
Son poste à l'Académie des Sciences avait été confié à quelqu'un d'autre, sa femme s'était remariée et ses enfants s'étaient partagé ses biens.
Transit de Vénus au Lycée d'Uturoa
avec une lunette 70/400 + 1 filtre 1/1000 000 + 1 webcam ToUcam
(noter quelques taches solaires vers le centre)
Alors que beaucoup d'entre nous auraient renoncé, il décida de se battre et réussi à retrouver son poste, à récupérer une partie de ses biens (peu en fait, merci les enfants...), et épousa une belle jeune femme avec laquelle il eut une fille et vécu 20 années de bonheur.
Bien que n'ayant finalement observé aucun transit convenablement, son nom est associé malgré lui à chaque transit de Vénus.
Mercure fait également des transits (voir tableau plus haut). Assez fréquemment d'ailleurs, et le prochain sera en 2016. Mais sa petite taille et sa distance à la Terre plus lointaine rendent ses transits moins intéressants.
Le transit de juin 2012 a permis de calibrer les expériences de détection des planètes extra-solaires (les exo planètes) et de leurs atmosphères.
Source web.
En effet, comme pour Vénus, la lumière du Soleil qui contourne la planète en transit, et qui traverse son atmosphère est différente de celle du reste du Soleil, cela permet de connaître les éléments chimiques présents dans l'atmosphère de la planète en question. Ou de l'exo-planète maintenant.
Alors que les mesures de 1761-1769 et surtout celles de 1874-1882 ont permis de fil en aiguille de calculer la taille du système solaire, il n'est pas impossible que celles de 2012 permettront de confirmer un jour prochain la présence d'une forme de vie sur telle ou telle planète lointaine.
Photos de mardi après midi au lycée d'Uturoa .
Crédits: Jean-Claude Bocher, Danièle Lachaux, Marc Incamps (télescopes + les deux photos du transits: un en rouge, l'autre en blanc-gris).
Merci à Christian Girard (CDI) - chemise rouge + parasol, pour son aide précieuse cet après midi là.
A gauche en noir & blanc: les images réelles prises par la webcam
A droite en couleur: ce que le logiciel Starry night prévoyait à ce moment là.
Le tout diffusé sur une grande TV placée sur la scène.
L'arrivée de Vénus les jours précédents.
Le sténopé a permis de voir le Soleil, mais pas Vénus (trop petite)
En revanche, le filtre Ciel & Espace placé au centre d'un ancien calendrier repeint est très efficace:
on voit bien le Soleil, Vénus (en bas à droite), et en plus, on a de l'ombre...
Le cadran solaire du lycée d'Uturoa
Merci à tous ceux qui sont venus, à Christian, et à l'équipe technique du LUT.
Prochain rendez vous: 13 novembre 2012 pour l'éclipse partielle de Soleil,
visible à Raiatea
(et qui sera totale en Australie, vers Cairns)
A propos d'Australie, l'astronome Français Thierry Legault, célèbre pour ses photos de passage de l'ISS, Hubble, etc devant la Lune ou le Soleil, a réalisé une série impressionnante de photos du transit depuis l'Australie.
Voir son site ici.
Voir aussi l'
article de Ciel & Espace concernant le transit vu de puis l'espace ou l'île de la Réunion:
